ROUTE DES VOSGES 2016 Imprimer
Écrit par Patrick DECOEN   

Ecrit par Bernard Lefevre copilote de la Renault 8 Gordini

Loin des exploits du CHAMP 2016 de la Legennes' Family dans le sud-ouest, les Lefèvres' Brother roulaient dans le nord-est où avait lieu la 19ème édition du Rallye des Routes des Vosges, clôture du THRF 2016.

Le rallye affichait complet avec 60 voitures engagés, toutes d 'avant 1980. Une charmante Giuletta 1963 frôlait les rondeurs d'une Aronde 1958, une Chevrolet Corvette 1965 côtoyait une Facel Vega 1964, une 600 Abarth devançait une Mustang 1965, une NSU 1200 TT paraissait bien frêle à coté d'une 3500CS BMW et une A112 Abarth ne s'en laissait pas compter au coté d'une Ascona rageuse pour les plus modernes. Il y avait de la TR3 anglaise, de la Dauphine Gordini suisse, de la MG B luxembourgeoise, de la Ford Escort allemande et les BMWéé plutôt belges : Michel Thomas, le GO du rallye a un carnet d'adresses étonnant. La Bresse était donc européenne ce week-end puisqu'on y rencontrait outre les français, des allemands, des luxembourgeois, des suisses, des hollandais, mêmes des anglais, et vous vous en doutez bien, de nombreux belges. Au centre névralgique du rallye, le bar de l'hôtel, la passion automobile, et probablement aussi un peu la bière, ont lié tout ce petit monde dans une jolie cacophonie babélienne.

Originalité du rallye, il y avait un prologue, facultatif donc non pénalisant, le vendredi en fin d'après-midi d'une soixantaine de kilomètre. Cet excellent exercice permet de prendre en main l'esprit de la navigation qui nous attendait le lendemain matin.

Le samedi, départ dans les frimas matinaux de la montagne Vosgienne pour aller rapidement au soleil sur les routes des crêtes vers le Hohneck, complètement recouvert de givre étincelant. Puis par le col de la Schlucht, basculer coté alsacien jusque Orbey, puis retour par le col du Bonhomme et le lac de Gérardmer. Les paysages sont somptueux sous ce beau soleil automnal qui éclaire les forêts et les vignes mordorées.

Le road-book nous met vite dans le sujet avec une ZR aux moyennes plutôt lentes (table variable) mais avec une navigation composée de photo d'intersections, non numérotées, indiquant les directions à suivre. Ce n'est en soit pas très difficile, mais en régul ça met de suite une grosse pression et donc la caravane du rallye s'en trouve d'un coup très éparpillée semble-t-il. Mais nous nous tirons très bien de ce guêpier. Beaucoup moins bien, juste avant la pause, dans un carto à tracer je délaisse complètement un point rouge de passage obligé très excentré sur la carte, je loupe une grande boucle où nous laissons 2 CP et une pince... ça fait mal au moral ! Etrangement, une moitié des experts (la carte était tracée pour les Classiques) se fera avoir par ce point rouge furtif !

La suite du parcours se passe plutôt bien. Nous sommes à l'heure au départ des ZR (en auto start) et en avance aux CH, sauf une fois. Dans l'après-midi, une erreur dans le road-book a eut des conséquences dramatiques pour certains : dans un carto, nous devons relier des points d'altitudes, dans un ordre donné, avec routes barrées et flèches obligatoires. La carte indique où nous entrons et où nous devons sortir. Facile ! Sauf que le point d'entrée marqué n'est pas du tout là où nous sommes réellement, il y a 8 km d'écart... Ca cogite dans la R8 : soit nous sommes complètement "à l'ouest"... peu probable ; soit il faut rallier au plus court le point d'entrée du carto et commencer seulement le tracé avec les points d'altitudes, tout ça sans se croiser... faisable mais très compliqué et donc très très long, ce n'est pas l'esprit de Michel Thomas. Les minutes passent et les voitures passent et repassent dans tous les sens. Machinalement je fais un tracé depuis l'endroit où nous sommes réellement jusqu'à la sortie : une solution et une seule trace s'impose. Ce doit être ça la solution ! Trip recalé au point de départ, nous faisons le parcours... et ça colle avec le métrage de la case qui suit le carto. C'était La Bonne solution ! Mais c'est une hécatombe au CH suivant. Les retards sont légions... Le déjà vainqueur du THRF 2016, Camille Thirion, pointe avec 38 min de retard, un peu colère ! Mais fort logiquement la direction de course supprimera cette pénalité.

Une tarte aux quetsches et un café plus tard, nous repartons pour la dernière étape, plutôt roulante, hormis les ZR plutôt assoupissante... Bien mal m'en a pris : dans la dernière ZR du jour, il faut faire une tracé au plus court sur une carte du style "Google Maps". Facile ! C'est une montée dans un col, sur une route plutôt large, les lacets se déroulent au long de la montagne dans un faux rythme. Navigation inexistante, je me concentre essentiellement sur le timing de la régularité... Quelques dizaines de mètres après une épingle, je jette quand même un œil machinal sur la carte, et je vois qu'on aurait dû attaquer cette épingle gauche en sortant d'un enchainement gauche-droite serré... et ce n'était pas le cas. La route est tortueuse, certes, mais rien de serré... De suite je pense à une bidouille de carte !

- Avant la dernière épingle, il n'y avait pas une route  sur la droite ?

- Non, rien !

- Un chemin ?... un terre-plein de stationnement ?... une aire de bucheronnage ?  une sente à sangliers ..??

- Non je n'ai rien vu... mais c'est impossible ton truc !

C'est vrai qu'on est à flanc de montagne au milieu d'immense douglas, une aire, un chemin ou une route qui décroche à droite, donc coté ravin est impensable.

- Je ne comprends pas, il y a quelque chose !... il faut faire demi-tour pour vérifier...

-  Frangin, t'es sûr de ton coup ? ... je te rappelle qu'on est en régul, faire demi tour maintenant va nous couter cher...

- Un CP, c'est 3'30'' de retard... étant donné la moyenne basse on devrait pouvoir se recaler rapidement...

Demi-tour sur les chapeaux de roue et la R8 descend en trombe. Nous croisons Patrick DARLEY et Olivier SUSSOT complètement ahuris dans leur MG B. Une fois passé l'épingle dans le sens de la descente, on voit un chemin qui remonte fortement, et en bas on aperçoit un panneau de CP ! 150-200 mètres plus loin on trouve effectivement entre des rochers l'entrée de ce chemin qui descend dans une aire de stockage de grumes. Avec la déclivité, la roche et les sapins, c'est complètement invisible. Improbable, mais réel ! Après avoir pris le CP, on remonte type "course de côte" reprendre notre place dans la ZR. Mais nous ne parviendrons pas à rattraper parfaitement notre retard malgré tout...

A l'hôtel, c'était la fête de la bière en attendant un diner fort agréable où Michel Thomas a récompensé la plus désirable des voitures (élue par l'ensemble des participants) en l'occurrence la très belle Giuletta et félicité les mieux classés du prologue de la veille : un festival belge !

Le dimanche matin, sans donner l'ordre, les 5 premiers sont divulgués, dont 4 équipages belges... Nous reprenons la route sous un temps couvert mais sans pluie, le parcours nous emmène vers les Vosges Haute-Saonoises, dans un petit pays très sauvage aux milles étangs où le temps semble s'être arrêté. La route est étroite, capricieuse et la voiture tressaute énormément. Les carto s’enchaînent, j'ai encore fait une erreur avec une consigne pas vue sur la carte, 1 CP ! Et un piège dans le lequel je suis complètement passé au travers sans m'en rendre compte, 1 CP ! Après la pause "pâté Lorrain" un, pourtant court, fléché allemand nous a donné du fil à tordre encore une fois. Il était accompagné d'une petite carte dont la plupart des routes était en bleu... Or le fléché allemand était en bleu. Ça semble évident maintenant, mais sur le moment nous n'avons pas du tout imaginé que seules les routes bleues pouvaient être comptabilisées ! Heureusement nous avons été quelque peu tirés de cette galère... Le kilométrage suffisamment long nous permettait ensuite de nous rattraper pour être à l'heure.

La remise des prix avait lieu à la station de la Bresse, aux pieds des pistes encore vertes sous la pluie et dans la brume. Nous finissons finalement 6ème, une très bonne place pour nos performances que nous pensions très moyennes !

Si pour le THRF le titre pilote expert était déjà joué, le titre co-pilote était très serré : 3 copilotes en 4 points ! C'était celui qui était le mieux classé au Routes des Vosges qui emportait le titre. L'un d'eux, le belge Christian LAUFFS et son pilote Thierry DELPORTE partaient devant nous sur FIAT X1/9. Beaucoup d'hésitations, de mauvais choix, on voyait bien qu'ils n'y étaient pas. Daniel Pigeolet avec Michel HERMANS sur ALFA GT Junior ainsi que Bernard PERRET et son fils Alex sur leur Berlinette se battaient aux coudes à coudes. Mais étrangement, Bernard s'est "écroulé" dimanche matin... Ce fut Daniel Pigeolet.

Parfois l'Europe me pèse...

Mise à jour le Mercredi, 26 Octobre 2016 20:23